Postulat et démarche psychanalytique
Postulat et démarche psychanalytique
La démarche analytique s'appuie sur l'ensemble des postulats et la corrélation symbolique.
Être en démarche psychanalytique implique d'aller vers l'intégration.
Ces outils de perceptions et leurs utilisations peuvent s'entendre comme :
« des garde-fous »
Nous avons pu remarquer combien tous les postulats s'interpellent dans une complémentarité, une globalité.
Ainsi quel que soit l'événement, les symptômes, ils sont à passer au crible de l'ensemble de nos compréhensions. -- plus nous nous donnons les moyens d'être dans notre ressenti au présent -- plus nous positionnons de corrélation symbolique, plus nous intégrerons de postulats.
Précisons l'anima, l'animus non intégrés
L'Anima -- l'Animus est un archétype, double comme il se doit dans nos perceptions, ils forment un ensemble indissociable (Carl Gustave Jung).
Leur fonction -- ce qui anime l'être -- s'entend dans la notion de pulsions freudiennes (même s'il ne l'a pas toujours exprimé clairement) , il s'agit des deux formant de la pulsion soit l'emprise et la satisfaction (Paul Denis) une partie féminine (l'emprise) une partie masculine (satisfaction ou libido).
La pulsion initiale -- en rapport à la vie en l'être -- se perçoit donc sous deux axes indissociables (en tout être). Mais les perceptions erronées au niveau du patrimoine émotionnel et affectif de l'humanité nous proposent de les dissocier, puis d'en rechercher les effets -- dans l'autre quel qu'il soit -- (en utilisant les signifiants : amour de l'autre, empathie, solidarité, lien social ou de famille...)
L'autre quel qu'il soit ne peut nous donner cela, chaque être l'a en lui -- pour lui-même --. Ce qui n'exclut pas au niveau -- de la vie -- (ce qui est naturel) d'échanger des complicités et du plaisir. Mais apprécier, ce qui s'échange ou plus souvent ce qui espère s’échanger ne peut se dire, aimer l'autre, au mieux dans cette approche en conscience j'apprécie ce qui s'échange.
Ainsi les formulations d'Anima non intégrée ou indifférenciée, d'Animus non intégré ou indifférencié présentent notre façon maladroite d'entendre et d'utiliser ce qui nous anime – l’Âme -- qui se signifie comme le réel, c'est-à-dire qu'elle ne peut qu’échapper à nos perceptions extrêmement limitées, d'ailleurs fussent-elles, ces perceptions, tout d'abord employées dans toutes les potentialités qu'elles nous offrent. (Ce qui n'est pas le cas dans la normalité des groupes que nous formons.)
Ainsi pour préciser au quotidien notre façon maladroite d'expressions de ce qui nous anime nous pouvons employer et étudier les comportements masculins et féminins dans l'être (toujours double, jamais l'un sans l'autre.)
Chacun de nous façonne au niveau inconscient une image idéale de ce qui est attendu de l'autre et quand l'occasion : l'objet -- le portemanteau (c'est-à-dire l'objet que nous voulons aimer ou plutôt qui doit nous aimer) se présente, cette image construite est projetée sur cet être qui parfois peut donner, par effets d'illusions, l'impression de répondre à notre demande... L'autre peut être là, mais dans un autre but, il joue sur un autre film avec des intentionnalités différentes mais il faut bien dire -- souvent en harmonie complémentaire et pathologique non dite -- (chéri e nous allons construire de la souffrance) surtout quand se désire et se forme l'idée de construire un couple ou une relation.
Ainsi il suffirait d'accueillir notre relation à l'autre pour ce qu'elle est au présent, ce qu'elle est hors projections...
L'homme mais aussi la femme ont tendance à sacraliser l’imago maternelle qui se pose sur les images ou objets : la mère, la femme, la partenaire, la sœur... En lui supposant les attributs de l'Anima, cette sacralisation -- qui n'a pas lieu d'être -- dans le plan de vie sur cet objet, permet ensuite toutes les erreurs et « délire » de perceptions et de réactions... S'installent alors des formes de dévotion, de soumission, plus ou moins aveugles face à l'autre, nous sommes là dans la formulation de l'anima non intégré.
Sur l'autre versant s'entend la tendance à sacraliser l'image paternelle, le père, l'homme, le partenaire, le frère, le tribun, l'orateur, le maître, l'artisan, l'artiste, le sage, les médiateurs d'un savoir, d'une connaissance, d'un exploit à la mode... En lui supposant les attributs de l'Animus, cette sacralisation implique le désir d'identification, de possession, afin d'en obtenir la puissance projetée. L'individu aveuglé est alors chevauché par les lois, les vérités, les dogmes que propose l'animus non intégré.
L'âme (l'Anima - l'Animus)
Ce sont des images archaïques qui nous présentent L'Archétype, ce qui anime, l'âme, l'Anima Mundi... L'Archétype... Nous ne pouvons pas le percevoir, nous ne pouvons pas en parler, nous en sommes pourtant imprégnés -- impressionnés -- et nous essayons de décrire nos impressions au travers de nos filtres d'expressions infiniment réductrices.
Mais en se confrontant à ce qui nous imprègne, à ce qui nous impressionne -- par la conscience qui s'en forme -- nous en sommes de plus en plus impressionnés en conscience...
Il peut en résulter en fin de compte un grain de sable, de conscience, d’Être, quand nous nous donnons les moyens parfois « de lui donner forme », celui-ci a le mérite d'être et de savoir qu'il est, et ainsi d'entendre un peu ce qui l'anime.
Présentons une autre forme d'impression ou regardons, en fin de vie, cette dépouille mortelle, post-mortem, ce cadavre, une dépouille, ce qui reste là, qui s'offre à notre réflexion.
La mécanique est là, l'ensemble des fonctions était animé... Et là, c'est éteint, l'âme n'est plus là. La vie et ses motivations s'en sont allées, le sac, la mécanique est là, mais c'est vide et inanimé... Et par ce manque d'animation, la décomposition se met en place pour un retour à la matière.
L'âme s'en est servie... Et pourtant ce qu'il y avait dans la matière, animée par l'âme, a ou avait la possibilité d'être d'autant plus animée par l'effort et les motivations qu'elle suscitait...
L'être a les possibilités de s'animer -- de concert -- à l'âme qui l'anime ou de ne prendre que peu ou même pas, de conscience de cette vie.
La vie n'est pas la mécanique de la dépouille fut-elle sublime cette dépouille dans son ingéniosité, ce n'est pas la mécanique qui se meut, c'est l'âme qui s'y pose, qui propose peut-être (nous pouvons le supposer) à l'être, de s'éveiller et de prendre un peu plus conscience de ce qui l'anime, lui, et tout ce qui l'entoure.
L'âme, le côté émotionnel, de sensibilité profonde, implique néanmoins une forme d'essentiel -- d'essence -- de sens -- à la vie...
L'approche en démarche psychanalytique c'est l'étude de ce qui nous anime et de ce que nous pouvons en faire, excessivement peu parfois...
Les religions, notamment celle de l'amour de l'autre et souvent de celui du grand Autre, toutes ces religions se prévalent de savoir ce qu'est l'archétype et de plus d'en être, les médiatrices privilégiées.
La démarche psychanalytique permet de préciser qu'elles ne sont que des formations résiduelles de l'utilisation des processus intuitionnels dans l'être... (Jung), Lacan nous propose comme signifiant : le féminin, dans l'être (et ses jeux de suppléance.) L'expression humaine de l'Éden et des figures d'Adam et Eve nous proposent de percevoir le côté féminin et le côté masculin dans l'être qui désirent s'accaparer de la toute-puissance et de la vie éternelle.
En fait, une erreur de perceptions infantiles que nous pouvons, chacun pour soi, modifier en posant notre attention sur ce qui nous anime, la vie.
Pour mémoire le pervers
Pervers « Est pervers ce qui détourne une loi, une règle -- pour un surplus de plaisir, jouissances » parfois à l'insu du sujet lui-même ! À son insu, peut-on dire à tel point qu'au lieu « de plaisir – de jouissances perçus comme parfois vécus » il souffre, il se -- tyrannise -- se positionne dans un état de morbidité -- sans bien le savoir, le reconnaître.
Une question : Est-ce que la normalité névrotique ne possède pas ces bases perverses et ainsi proposerait -- cette même morbidité -- à l'ensemble « des normopathes. »
Ou les normopathes, sont-ils beaucoup plus, malades, que nous désirons le supposer ?
Pour ma pratique personnelle et clinique, je le perçois, le vit quotidiennement; est-ce à dire qu'entre autres -- le voyeurisme, l'exhibitionnisme, le fétichisme, le sadisme, le masochisme... – sans oublier l’agressivité cannibalique et le désir d’emprise sur l’autre feraient partie de « notre pain quotidien » -- en ce qui me concerne, c'est une évidence ; je perçois cela de moi et des autres... -- pures ou simples projections ! Peut-on s'exclamer ! Peut-être ! ...
Mais il me semble avoir lu : « L’inconscient est problématique pour l'être, quand celui-ci se refuse de le voir. » (Jung)
Ainsi donc, lorsque la pulsion d'emprise ou/et la libido sont déviés de leur but -- pour être utilisées plus ou moins inconsciemment, le plaisir est ainsi perverti à tel point que l'être n'est plus dans l'état de s'en donner en rapport à sa vie ;
Ce manque de plaisir l'implique dans les jeux d'interpellation/séduction d'où l'utilisation :
de la frustration, la simulation, l’insatisfaction, la distanciation
Ils sont communs à toutes les cultures et se retrouvent -- par les souffrances qu'ils occasionnent -- sur les plans :
physique, psychique, relationnel et comportemental –
à engendrer l'usage de l'éventail de toute la psychopathologie.
Les jeux de volonté, le désir de pouvoir sur l'autre, se retrouvent dans les structures : névrotique, perverse, psychotique et par évidence dans les états limite ; certes, les artifices culturels, l'illusion des religions dans un premier temps nous éloignent de leurs perceptions ; mais la démarche psychanalytique permet aisément de les rencontrer.
Ainsi, les jeux de stratégies, d'anticipations, dans ce qu'ils ont d'inconscient « selon les mécanismes de défense : le déni, le refoulé, le rejet... qui agissent, par suite, comme des résistances aux changements » sont utilisés dans l'être pour ce désir d'emprise sur l'autre ou pour se défendre de ce que l'on pressent implicitement dans la relation à l'autre.
Les interdits surmoïques marqués par le conditionnement des religions, la moralité des cultures, agissent comme un leurre qui focalise l'attention et ainsi, empêchent de percevoir que les jeux de pouvoir sur l'autre, dérivés de la volonté de toute-puissance, toute jouissance ont tendance à dominer et à utiliser -- pour les servir -- toute la panoplie d'aptitudes psychopathologiques de l'être.
Ainsi en donnant de l'importance à la panoplie consciente et rationnelle, on scotomise, les souffrances, de la misère relationnelle et sexuelle vécue dans la normalité dite non pathologique.
Face à la fonction du nom du père, il peut s'entendre, que nous trouvons des personnalités qui acceptent plus ou moins de s'y soumettre, d'autres qui font comme si, d'autres qui se positionnent dans -- le pas toute --.
Pouvons-nous entendre que par le lien social, les névrosés peuvent aussi utiliser, mais non-dit -- le comme-ci -- et « le pas tout » ; de plus, l'agencement de la normopathie, perverse, qui semble s'installer, « se généraliser » dans le groupe humain, ne fait pas l'impasse sur le refoulé et le pas tout...
Le pas toute, de Lacan pourrait être entendu comme ce qui se situe dans les comportements féminins en l'être, dans le sens je ne suis pas entièrement sous... Ou il y en a quelques-unes qui y échapperaient, et le comme si, on s'en débrouille, on fait avec, on s'en arrange peut amener à percevoir plus ou moins inconsciemment l'autre comme un objet partiel, que je pourrais utiliser à ma guise.
Ce n'est pas, de fait, ce qui se montre sur la scène qui devrait attirer notre attention pour désigner la perversion, mais plutôt ce qui beaucoup plus subtilement, -- ne se dit pas -- ne se voit pas -- ne s'entend pas « le non-dit » la cause première du pourquoi nous ne voulons pas voir, entendre et ne pas dire...
extrait : Anima –– Animus le lien, les désirs, la fonction 2016 René Bommelaere
L'emprise et le féminin en nous.
(L’adolescence interminable dans l’être qui se joue à s’attarder dans l’expérimentation des limites de la relation à l’autre.) [1]
Le féminin joue avec notre travail analytique... Il s'arrange pour nous aider à ne percevoir qu'une partie des situations, il s'arroge le droit à en modifier le sens, toutes les interprétations possibles. Cela est plus probant lorsque l'être ne se positionne pas dans un désir de vie, dans un changement effectif qui corresponde à ce qu'il est et ce qu’il a profondément.
Le féminin cherche à mettre en place des comme si, des faire semblant, nous allons faire comme si nous étions en démarche psychanalytique. À un autre moment le féminin en moi, sur un plan constructif, me propose de préciser une projection, celle d'un jeu émotionnel/affectif sur un objet.
[1] Cf. Le concept d’ENI, Au nom de l’Amour (Evelyne Tapie -- René Bommelaere)
Le féminin dans l'être
Le féminin dans l'être nous interpelle dans l'art du fallacieux, des faux-fuyants, du verbe, de l'estompage, de la défocalisa-tion, de l'esbroufe. Il propose l'apogée du comme si, de la mascarade, (pas sans parade.)
Voilà à quoi peut servir le féminin en l'être, cette forme d'utilisation résulte, à ce niveau, de l'ensemencement de la bêtise universelle :
Par le commerce relationnel qui s'échange dans ce que l'on peut nommer, l'émotionnel-les sentiments, marqués par le désir --. Cela implique la prostitution de l'être, l'agressivité, la futilité, la convoitise, la sécheresse,...
Il propose là, l'argent facile, l'oisiveté, la soi-disant gloire, le vide, l'apparence puis toutes les formes de dégénérescences -- inconscientes et intenses -- voilà la façon de l'employer au quotidien dans notre vie, cela ne demande pas d'efforts...
L'autre face du féminin, l'expression de la féminité de l'être, s'interpelle dans l'effort, parfois avec une certaine inconscience, ce sont d'ailleurs les perceptions de ces prémices qui peuvent nous inciter à s’y poser en conscience.
L'effort donc de se positionner, en attention, afin d'accueillir les bases d'évolution de vie, d'écoute, d'appréhension de ce que nous avons à entendre, là, ce situent nos capacités de communications avec intelligence, à l'enseignements de vie, et les facultés d'éveil à la sensibilité qu'elle propose.
La féminité nous permet de vibrer dans le plaisir de l'effort, celui de se construire, le plaisir d'y être pour quelque chose, là, par évidence nous sommes dans l'art, dans l'expression d'accueil de l'art, dans l'expression du sacré de la vie...
Mais la seule façon -- dans la simplicité -- c'est de s’y poser, d'y être, d'accueillir, d'agir, en fait, tout simplement de vivre.
« La femme » (le déguisement du féminin pour la gloire d'une supposée emprise) n'est qu'un leurre, elle n'a pas d'existence, de consistance, « la femme n'existe pas » Lacan, comme d'ailleurs son pendant, son vis-à-vis, l'être femellisé qui se joue à "l'homme",
le petit homme des déesses mères, le pantin, l'automate, le guignol, le héros à maman...
Ainsi pas de mascarade sans parade. Le tout -- dans l'inconscience -- tributaire des effets de suppléance, garant du délire collectif -- nous l'appellerons pudiquement fantasme, là, normalisés, estampillés, aveuglés par les artifices, nous pouvons en crever sans désirer le percevoir.
L'Homme existe, mais comme l'Être ou le Sujet (porteur sexué mâle ou femelle) il suffit de décider d'advenir, d'y être pour quelque chose -- simplement humain --.
Quand Jacques Brel avec perspicacité chante, dans L'air de la bêtise, cette chanson pourtant la moins connue est néanmoins une des plus – brillantes -- de ses oeuvres :
« Les putains, les vraies, sont celles qui font payer, pas avant, mais après ! »[1]
Il précise l'intentionnalité, le sens, mais là, c'est moi qui exprime et interprète:
« l'institution du mariage civil ou/et de religion propose, absout et bénit la prostitution dans ce contexte. »
Ne serait-ce pas une forme d'hypocrisie de ne pas vouloir l'entendre.
De plus, le fait d'engagement -- à vivre ensemble -- interpelle les mêmes programmations.
« Ni croire, ni ne pas croire, mais expérimenter ! »
(Carl Gustave Jung)
C'est ce que j'ai fait, je fais, j’écoute et cela va de soi que la normalité sociale nous propose ces jeux dans toutes les formulations de couple... ou groupes.
« Vendre son âme au diable » ceci n'est qu'une métaphore bien que... L'action explicite de la dite prostitution sur la voie publique en elle-même est un acte de commerce clair et précis. L'implicite et l'inconscient -- non reconnus – eux, sont porteurs de pathologies plus conséquentes. Là, la culture, la société, deviennent « La mère maquerelle », les églises fussent-elles millénaires en sont d’autres. La distribution des rôles oedipiens se propose – à tous les étages du groupe humain…
Le féminin et la suppléance :
Le féminin dans l'être propose une capacité de suppléance, ses capacités permettent de construire une représentation, une réalité vécue non objective qui peut par suite être mémorisée comme une vérité.
Cette construction : perception -- représentation -- réaction peut être mise en place -- à tort, à raison -- avec les instances surmoïques pour élaborer et conforter, pérenniser une décision.
Cela s'utilise avec aisance sous l'égide de la névrose, face au dilemme du choix, de la décision en conscience... ainsi, si les instances surmoïques sont prioritaires (les désirs de toute-puissance et le regard des autres mis en avant), nous pouvons nous prouver à l'aide d'une perception construite -- sous forme de justifications de conduite -- que la représentation vécue est profondément objective.
Par suite je peux tout faire pour croire à cette réalité objective afin d'affirmer que je dois rester dans cela ou que je dois choisir cette voie là et que j'ai raison de faire ce choix Je peux donc le répéter, le dire à l'autre, afin de m'en persuader de plus en plus.
Aussi quand le doute parfois s'installe, je reviens -- en rappel -- à cette suppléance construite. Elle sert, nous le comprenons, à entériner notre plan de conduite pour positionner les intentionnalités de toute-puissance que nous avons projetée et dont nous ne voulons pas nous séparer.
Je précise donc face à un choix, je me crée un film, une situation qui répondra aux désirs surmoïques, par suite je peux désirer entériner le film construit que je peux réutiliser pour chasser les éventuels doutes. [2]
[1] PS : La prostitution c’est au moins à deux sinon plus qu’elle se vit…
[2] « Ici se pose le besoin de se prouver d'avoir perçu -- la vraie vérité -- quant à l'autre, afin de ne pas oublier la justification de notre animosité... »
La suppléance :
Elle implique le féminin dans l'être, dans sa capacité à inventer des histoires, d'y croire et de désirer vouloir y entraîner les autres.
Quelles sont -- les histoires-souvenir -- auxquelles nous tenons le plus ou que nous avons vécu ces derniers temps?
Voici un quaternio qui peut être aussi bien utilisé :
-- D'une façon inconsciente négative :
l'imprégnation -- l'impression -- imprimer -- mémoriser –
(l'imprimatur pérennisé)
-- Que sur un plan constructif et positif !
s'imprégner -- s'impressionner – s’imprimer – et mémoriser en conscience
La seule différence est que là ( à ce niveau de perceptions) il y a une marque de Sujet. (s’)
Les simulations :
L'utilisation des simulations pour se grimer dans un rôle, pour imposer notre scénario implique des possibilités de réponses, plus ou moins inconscientes, pour faire face aux situations soient :
-- des réponses aux conséquences de l'hontologie (sauver la face) « être pris la main dans le sac et détourner l'attention à l'aide de la mise en place d'un symptôme »
-- ou des réponses à des choix, des décisions sur lesquelles l'individu ne sait pas agir pour lui, là, les processus incons-cients pathologiques créent cette suppléance...
La suppléance, une fantasmagorie qui amène l'individu à se vivre -- dans le subjectif -- en se croyant dans la réalité objective... C'est alors pour lui vécu comme une vérité, une certitude indiscutable, car cette construction s’inscrit sur -- les ferments fondateurs -- sur lesquels s'étayent et se justifient, le choix, la décision.
Nous sommes dans une forme transférielle où l'être est totalement aveuglé par les processus inconscients.
Le choix, cette décision, nous le précisons est une réponse des processus inconscients masqués par les jeux de pouvoir et d'espoir de toute-puissance mis en place (jeux de pouvoir qui restent les garants, l'assurance de la réussite espérée.)
D'où les résistances au changement et la réponse qu'ils impliquent.
Rappel : C'est dans la dynamique de l'action que le sujet prend forme. L'inhibition d'action, les réactions, freinent et bloquent l'évolution au bénéfice des instances surmoïques...
Nous pouvons préciser que l'imaginaire est au service des intentions intuitives prévaricatrices, quel que soit le scénario et les jeux d'acteurs élaborés dans le cadre de la suppléance (un processus inconscient.)
Prendre ma place ?
Auteur: Damien Kappelhoff, Avril 2015_v2
Prendre ma place
Avertissement
Les écrits qui suivent sont le fruit des perceptions personnelles de l’auteur. Son unique but est de partager une démarche de recherche personnelle. Les interprétations du lecteur lui sont propres et ne peuvent en aucune mesure présager des intentions de l’auteur.
Par rapport à quels critères ?
Si je parle de prendre ma place, cela m’évoque, entre autres, des notions de réussite sociale, professionnelle, familiale, sportive, etc. Il me paraît intéressant de savoir de quoi est fait ce sentiment, cette perception d’avoir ma place.
D’emblée, il m’apparaît que la notion de réussite se mesure en fonction de références : j’ai réussi si j’ai, si je peux, si j’ai fait, si je sais ceci ou cela.
Ces références, pour ce qui me concerne, restent très nébuleuses. Il est surprenant de voir à quel point, je me contente généralement de cet état de fait. Sans surprise, j’aurais tendance à les considérer comme acquises, à ne pas les remettre en question. Il me faut faire un effort pour dépasser certaines résistances surmoïques, pour me pencher sur leur nature, sur leur genèse. Autrement dit, pourquoi pour moi, ceci ou cela est-il un critère de réussite ?
Mon point de départ est donc que je me considère à ma place ou non en fonction de références principalement non nommées, indifférenciées.
Dans ma démarche psychanalytique, la nécessité progressive d’identifier les références qui m’animent, leur origine[1] s’est fait jour. Quand je dis origine, pour moi, c’est rechercher ce qui préside, pousse, met en place ces références.
Avant tout des critères en héritage
Dans cette recherche, j’entends très rapidement que le milieu familial, ses aspirations, ses croyances, ses références se reflètent dans « certains » de mes choix de vie. J’entends par « milieu familial », non seulement la famille biologique, mais aussi l’ensemble des valeurs transmises par les ascendants et plus largement le « bain culturel », le jus dans lequel je baigne.
Le milieu familial (au sens large) est, entre autres, chargé, d’idées préconçues (positives ou négatives[2]), de manques supposés, de peurs ou de sentiments qui me proposent de percevoir la vie d’une certaine manière.
Mon expérience personnelle s’ajoute à ces « couches de sédiments ». C’est tout l’héritage que ces groupes portent et dont je me suis imprégné. Ils ont été introjectés (faits miens, appropriés). C’est ce que je propose comme la « m(M)ère ». Tout cela m’apporte des repères sur ce qui est d’être à ma place dans la vie.
Si, par exemple, je prends le choix de la compagne : il m’est clair que ce choix est en partie dicté par les références du milieu dans lequel j’ai grandi. C’est la même chose pour mes études ou pour des attitudes physiques ou morales.
Autant d’indices qui éveillent ma curiosité et viennent titiller ce que j’ai pris jusqu’à maintenant pour des choix faits sur des références purement personnelles.
…mais aussi des critères personnels
Par ailleurs, mon expérimentation va « créer » des repères, des références de réussite. Si je me crois capable de ceci ou au contraire incapable de cela, il va de soi que ma perception sera teintée de ces croyances. Par exemple, cela m’influencera, et cela même avant que l’évènement ne survienne. Cependant, cette mince couche personnelle est en interaction continue avec des couches plus profondes d’influences.
Souvent basés sur des rivalités masculines en l’être…
Parmi les héritages ancestraux qui m’animent, il y a la croyance que prendre ma place ne peut se faire que si je prends la place de l’autre. Comme s’il n’y avait qu’une place pour plusieurs. Cela pourrait s’illustrer par la phrase suivante : « vouloir être calife à la place du calife ». De cette forme de rivalité découlent les notions de comparaison, de compétition.
Au quotidien, pas besoin d’aller chercher très loin pour trouver un exemple. Ainsi, contredire une personne devant un groupe en expliquant devant tous comme son point de vue ne tient pas la route ou comme il est maladroit dans tel ou tel domaine.
De plus, prendre ma place étant perçue comme : « ai-je fait mieux que l’autre ou non ? », une conséquences est que chaque « réussite », chaque fois que j’ai réussi à prendre « ma » place, il y a la crainte qu’un autre ne fasse mieux et me la prenne. Il en découle un fort sentiment d’insécurité.
Une autre conséquence est qu’une partie plus ou moins grande de mon énergie est perdue à vouloir conserver ma place. Par ailleurs, c’est autant de défocalisation de l’excellence que je devrais mettre dans ce que j’exécute.
Cette forme d’œdipe, de rivalité où il s’agit de prendre la place de l’autre est proposée comme « masculine ». Je la perçois en moi au quotidien, à de multiples reprises. Elle découle d’un arrière-plan fait de volonté d’emprise sur l’autre.
…tout autant que des rivalités féminines en l’être
À cette forme de rivalité, s’ajoute un deuxième versant complémentaire qui m’anime lui aussi. Il est dit de « rivalité féminine ». Pourquoi le nommer ainsi ? Car il est issu de la perversion de la féminité profonde de l’être (sexué mâle ou femelle).
Cette forme de rivalité portera plutôt sur le fait d’avoir ce que l’autre n’a pas, sur la volonté de lui ravir son objet, d’acquérir ceux-ci de les posséder. Le moteur se situe dans l’adrénaline procurée par le vol et la rage de cette dépossession perçue chez l’autre. Il s’agit de faire enrager l’autre, de jouir de sa défaite. Ça pourrait s’exprimer par : « na na na c’est moi qui l’ai… (et plus toi/et pas toi) ! ».
L’objet peut être un ami, une place, un titre, des relations sociales ou professionnelles, la compagne/le compagnon, le patrimoine de l’autre, etc. Elle découle elle aussi d’un arrière-plan fait de volonté d’emprise.
Je ne me prononce pas pour les autres, mais de ce que j’observe en moi, ces deux formes de rivalité sont présentes en moi, m’animent en continu.
Des pulsions déviées de leur but naturel…
Si je vais plus loin, je peux entendre que ces deux formes de rivalité, ces désirs de prendre ma place sont des déviations de la pulsion d’emprise. Cette énergie naturelle est mise à ma disposition, mais elle est utilisée à des fins (vaines) de volonté d’emprise sur l’extérieur.
Remettre ça d’aplomb… par la prise en charge de moi-même
Pour revenir à un fonctionnement plus naturel, il s’agit de prendre en charge ces processus qui m’animent à mon insu. Et ça, personne ne peut le faire pour moi !
Ce travail personnel, quel serait-il ? Il pourrait consister à identifier les rivalités, la volonté d’emprise qui m’animent afin de me rééquilibrer. Le but est que la pulsion naturelle d’emprise puisse m’inspirer, puisse s’exprimer de plus en plus naturellement sur ce que j’ai à faire pour prendre ma place. C’est un retour progressif à un modus operandi plus naturel, plus centré sur la réalité objective (concrète).
Comment vais-je faire ? Il va s’agir d’un travail d’étude et de rééquilibrage. Il s’appuie sur une fondation : l’observation. Observation de ce qui m’anime, de ce que je vis en moi, des évènements qui se présentent à moi[3].
Observation et accueil…
L’accueil de ce qui m’anime, cela m’apparaît comme répondre aux évènements qui se présentent avec une certaine présence. Pour moi, cela veut dire une attention à ce qui m’anime, à ce que je fais.
Cet état intérieur (« état d’être »), je le travaille, je le construis par la récupération des ressentis. J’entends par là, le travail de retour au corps, aux sensations corporelles. Le rétablissement de la communication avec mon corps est LA porte d’entrée. Être présent à ce qui s’y passe est LE sésame : cela déverrouille l’écoute intérieure des émotions, des sentiments.
Les pratiques corporelles qui ont pour base une concentration douce (« concentration déconcentrative ») construisent cette capacité au recentrage.
La présence croissante à mes ressentis, le travail de recentrage, de répétition des focalisations sur le corps autorisent progressivement la cohabitation de l’action et de l’écoute intérieure. Bien que cela puisse paraître surprenant, il ne s’agit pas d’être attentif en hyper-vigilance. C’est tout sauf une prise de tête.
Dans ces dispositions, des prises de conscience jaillissent. De manière surprenante, elles peuvent être très claires malgré le tumulte de la vie quotidienne.
…alliés à l’apprentissage tous azimuts
Les idées qui vont se faire jour proposent généralement une action nouvelle. Elle n’a rien de spectaculaire, elle est souvent modeste. Par exemple, il pourrait s’agir de l’idée de prendre des renseignements sur telle ou telle formation. Mais c’est rarement aussi « direct ». Ainsi, zappant sur la TV, je pourrais entendre en moi un désir de faire du modelage monte alors que j’aperçois une seconde d’un manga japonais à la TV.
L’apprentissage serait donc d’être curieux d’un maximum de domaines. Ce serait de m’intéresser non seulement à ce qui m’est facile (domaines dits intellectuels), mais aussi à ce qui me l’est moins, voire franchement pas (domaines dits manuels). Devant les idées qui montent, rien ne devrait être rejeté.
Une bonne manière de rester dans le mouvement est de ne repousser aucune idée d’action du fond. Même si l’idée paraît saugrenue, impossible aujourd’hui ou demain, son examen (par l’écriture) peut m’amener, en suivant le fil des associations intuitives, à d’autres compréhensions et actions à mener, concrètes et au présent. Ainsi, être à ma place signifie peut-être plus : être dans l’utilisation de mes outils, dans ma construction au travers de tous les apprentissages qui se proposent.
Tout peut être vu comme une occasion d’apprentissage, tout « devrait » être considéré comme tel. En toute honnêteté, je ne sais pas qu’elle est ma place dans la vie. Je ne peux le découvrir que par l’expérimentation.
Être dans cette démarche d’apprentissage (« d’apprenti-sage » ou de « sage-apprenti ») nécessite un effort. Celui de moins me laisser aller dans le flot des processus inconscients de groupe. Cet effort dans les apprentissages me conduit à ma place, naturellement.
Dans cette optique, la volonté d’emprise est de facto en sourdine. Pourquoi ? Parce que là, j’y suis pour moi et pour/contre personne d’autre !
Être sécurisé sans savoir
Habituellement, être à ma place évoque un état stable, si possible acquis une fois pour toutes, même si je m’en défends. C’est la vision m(M)aternelle : statique, la planque... Dans cette situation, ce sont les références, les interdits, etc. intérieurs et indifférenciés qui sont aux commandes.
Au contraire, au sens de la Vie, prendre ma place me semble quelque chose de dynamique. Il pourrait s’agir d’être dans le « courant de Vie ». Autrement dit de manière synthétique : de me maintenir dans le cycle consistant à observer, à comprendre, à accepter et agir, puis à accueillir le résultat. Ce n’est pas moi qui détermine la direction, l’intensité : mon travail est de rester le plus possible dans le flot, avec calme, lucidité, discernement et positivité.
Sous l’angle des associations intuitives de Vie, je ne peux pas savoir à l’avance ce qu’est prendre ma place. En effet, les idées qui surgissent ne se commandent pas ! Je ne peux donc savoir ce que j’ai à faire avant d’être devant l’évènement. Il est sûr qu’aborder la vie ainsi peut paraître peu sécurisant.
Sous l’angle de la pulsion de Vie, il n’y pas à m’inquiéter : je suis alimenté en continu par le fond naturel (l’inconscient profond).
« Ne cherchez pas votre place, vous y êtes » ?
Il me vient que sur le plan pathologique, mais aussi en non-pathologie que je suis à la place dictée par mes choix (inconscients pour l’immense majorité). Si j’avais fait d’autres choix, je serais ailleurs. Cela me paraît mathématique.
Cela ne signifie pas pour autant que je ne puisse pas en changer. L’utilisation du recentrage propose la lucidité du changement qui pourrait s ‘opérer. Et s’il y a acceptation, celui-ci se fait.
Si j’agis plus en accord avec mes intuitions de Vie, je vais être plus à ma place… et ce ne sera pas la même que précédemment, tout en étant peut-être la même !
En résumé, on pourrait peut-être dire qu’on est toujours à sa place, mais qu’on s’y met, on s’y maintient avec plus ou moins de conscience, d’inconscience.
Pour moi, la différence se fait là.
« Je ne suis pas à ma place » ?
La première question qui vient en écho à ceci est : qui parle en moi à cet instant ? Si je vis un (dé)plaisir : celui-ci est-il vécu en référence au surmoi ou au fond de Vie ? Ce n’est pas forcément évident à entendre !
Il ne semble pas possible au sens des mécanismes de l’inconscient profond de ne pas être à sa place. Néanmoins, on peut être de plus en plus à sa place intérieurement et en accueillir les échos sur l’extérieur. C’est dans ce sens que cela semble fonctionner et non l’inverse.
Attention aussi à ce que ce supposé (dé)plaisir ne soit pas une composante d’un scénario de prise en charge. Exemple : je ne me plais pas dans ce travail, dans cette relation, je vais donc le/la quitter.
« On ne peut pas prendre votre place » ?
Avec ce qui a été vu précédemment : quoiqu’il arrive, on est à sa place. C’est une contrainte de Vie. La seule différence se fait au niveau de la conscience qui m’anime ou pas dans la place que j’occupe.
La place où je me trouve est le résultat unique de l’ensemble de mes choix conscients et inconscients (personnel et profond) depuis la fusion des gamètes. Cette combinaison est unique, elle est propre à l’être, même si le sujet n’existe pas (encore). Un être ne peut, en vertu de cette combinaison unique, se trouver à la place d’un autre, lui prendre sa place. Cela ne semble pas avoir de sens.
Conclusion
Au départ, ces influences intérieures étaient toutes indifférenciées ou presque. Elles m’animaient à mon insu. Avec ce travail de récupération, ma façon de vivre l’extérieur devient peu à peu fonction de références intérieures de plus en plus différenciées.
Sur une base corporelle de plus en plus « solide », l’observation, l’effort, l’apprentissage m’amènent à devenir progressivement ma propre référence.
Je me rends alors compte qu’être à ma place extérieure est un facteur direct de références intérieures, d’une place que je prends à l’intérieur face à des influences intérieures. Cet accueil, ces apprentissages, proposent l’utilisation de mes potentiels de Vie (les outils innés et acquis), avec mon originalité dans les tâches que j’entreprends.
Je travaille mes ressentis (travail de récupération du corps, de confrontation au concret), des idées d’actions me viennent. Être à ma place n’est rien d’autre que de mener ces actions pour moi.
Ma place, je la découvre donc au fur et à mesure que je lève le voile sur les processus inconscients qui m’animent. Lorsque la lumière se fait, à moi de m’encourager dans l’accueil des processus inconscients de Vie et à cadrer les processus inconscients pathologiques. Notons que ces derniers ne sont pas à exclure dans la mesure où ils peuvent être utiles à la Vie : « en conscience, l’acteur peut jouer tous les rôles ». On est dans un mouvement itératif où l’excellence passe par la répétition humble et inlassable.
Prendre ma place est donc sans doute à entendre avant tout comme : prendre ma place en moi, plutôt que comme une place extérieure. Cela s’associe avec la notion de sujet : lorsque je prends ma place, que j’agis sur l’impulsion de mes intuitions de Vie alors, le résultat de cette action pour moi est une expression de réflexion personnelle, je me dégage progressivement de l’affiliation pathologique, une forme de sujet se fait jour, je prends ma place.
[1] La question d’accepter de répondre à cette nécessité étant une autre paire de manches.
[2] Bien que ces notions puissent être très relatives.
[3] Les 2 ont un lien très fort (cf. les mécanismes de projection de mon psychisme sur l’extérieur).
Être un Père pour moi, construire le Père en moi.
Auteur: Damien Kappelhoff, Juin 2015
Avertissement
Les écrits qui suivent sont le fruit des perceptions personnelles de l’auteur. Son unique but est de partager une démarche de recherche personnelle. Les interprétations du lecteur lui sont propres et ne peuvent en aucune mesure présager des intentions de l’auteur.
Être un Père pour moi, construire le Père en moi
La première fois que j’entends ces mots, cela s’associe immédiatement avec des notions de masculinité telles que l’autorité, la capacité à trancher sans états d’âme, l’aptitude à pénétrer dans la vie. Je n’ai pas vraiment vu ce que la féminité pouvait bien faire là !
Et pourquoi pas « être une Mère pour moi » ? Après tout, on les oppose souvent. Et si au lieu de cette opposition, ils étaient envisagés comme « deux faces d’une même médaille » ? Une figure double, alliant masculinité et féminité. En quoi cette notion de « Père pour moi » engloberait-elle ces deux pôles Père et Mère ?
Comme point de départ, je me propose de partir d’une situation concrète que je prête au Père : quand une action est à mener, que quelque chose est à faire, c’est fait sans délai, le Père intérieur tranche sans tergiverser. Là, j’entends bien une action de la masculinité en moi.
Qu’est-ce qui me permet d’arriver à trancher ? À faire un choix ? Je vois deux conditions à réunir : la première est qu’il faut une prise de conscience de la nécessité de trancher. La deuxième est la décision de trancher.
La prise de conscience est parfois proposée comme une bulle qui monte du fond de bon sens de l’être (inconscient profond). Elle remonte vers la surface du conscient. Mais dans quel état arrive-t-elle à la surface ? Elle passe en effet au travers des différents filtres de perception (les filtres surmoïques). Si tant est qu’elle monte au conscient, vais-je prêter l’oreille ? Entendre l’écho du fond qui me propose un changement positif, constructif pour moi ? Cette communication intérieure va-t-elle se faire et le message va-t-il être traité en accord avec son importance ?
Lorsque j’entends qu’il y a une action à mener, cela s’accompagne d’un vécu particulier. Pour moi, il me semble que je goûte fugacement (la petite marchande d’allumettes) à l’état d’être intérieur que j’aurais suite à ce changement. Ce vécu a une fonction de motivation, de déclencheur, par anticipation, je vais me vivre comme si le changement était fait.
Entendre à Décider à Agir
C’est bien beau d’entendre l’action à mener pour aller mieux, mais si je ne bouge pas…Pour avancer, il y a donc une décision de me mettre en mouvement.
L’être peut entendre qu’il y ait un changement à faire, mais tant que la décision de lâcher les bénéfices secondaires (mus par l’illusion de l’emprise) n’est pas effective, rien ne changera.
Pendant ce temps, les années passent et le bagage qui pourrait lui être utile pour gagner sa vie est délaissé. Il y a donc une perte qui est totalement disproportionnée par rapport à son bénéfice secondaire. Son plaisir passe par l’emprise qu’il suppose avoir sur « son monde ». Plus ou moins consciemment, il peut croire manipuler son entourage. Le point de mire du surmoi de l’être est donc à ce moment la volonté d’emprise.
On peut aussi envisager cela sous l’angle de l’effort : l’investissement ne semble demander aucun effort et pourtant si je suis mis devant la réalité de celui-ci, la connexion, le lien avec les attentes d’emprise sont souvent refusés. Celui-ci est même souvent nié au point qu’il reste caché à l’être (par lui-même, il ne veut pas le voir).
En outre, il me semble que la supposée absence d’effort mentionnée plus haut est une illusion : refuser de passer à l’action quand j’ai compris quelque chose m’apparaît un peu comme si j’étais sur l’autoroute au volant de ma voiture et qu’en même temps, je tirais avec force sur le frein à main. J’avance cela sur le constat du regain d’énergie, durable, qui suit un passage à l’action pour moi (c.-à-d. en accord avec mes compréhensions). Il faut une énergie considérable pour contrarier l’homéostasie.
Pour moi, il est alors très clair que s’il y a un goulot d’étranglement[1], ce n’est pas l’action, mais la décision. On est dans le domaine de l’analité (l’anneau d’étranglement).
La conséquence immédiate et concrète est que je reste sur place, dans mes vieilles récurrences mortifères. De plus, l’énergie mise à disposition par la compréhension et destinée au changement est bloquée. Elle doit donc trouver une autre voie d’expression. Cela pourra être dans une somatisation[2]. Ce déséquilibre au niveau du corps ou sur d’autres plans peut à plus ou moins long terme avoir des conséquences fatales.
Compréhension à Décision/Acceptation à Action
Ainsi, l’action requiert en moi (une « étincelle de conscience ») et une décision. Mais comment entendre en moi ? Comment comprendre ce que j’ai à changer ?
Il y a une évidence pour moi : si je n’observe pas, il n’y a aucune chance que je comprenne ce qui se joue en moi.
L’observation crée de fait une distance face aux évènements en même temps qu’un terrain propice où les associations intuitives vont pouvoir se faire (lucidité sur ce que je vis). Pour moi, l’acquisition de ce calme intérieur est un travail au quotidien. Cela passe par des relevés à l’écrit de mes vécus, par un entraînement à ressentir mon corps.
Cet effort de collecte, d’attention contribue à construire ce socle, cet ancrage dans le concret et le présent. Par ce travail de construction, je perçois progressivement mes vrais besoins. L’écoute intérieure, les désirs de changement prennent alors le relais et proposent les motivations pour adapter ma conduite.
Cette aptitude à l’automotivation est naturelle. Elle fonctionne harmonieusement lorsque sont présents : l’observation, le calme intérieur, la récupération du corps.
Si je reviens à mon propos, cette séquence fait apparaître que si au départ, il m’apparaissait que le Père en moi était essentiellement fait de masculinité, alors après cet exemple, le propos est clairement à nuancer. En effet, la capacité d’accueil, à la neutralité, l’aptitude à l’écoute, à la communication sont sans conteste des attributs de la féminité profonde. La capacité d’action est donc intimement liée à l’ancrage, aux fondations et à la motivation, à cette féminité de l’être.
Il a été évoqué la capacité du Père à passer à l’action lorsque c’est nécessaire. Pour moi, dans sa façon de s’engager dans l’action, il n’y a aucune réserve, aucune demi-mesure. Il m’est évident que l’action est menée, sans état d’âme, avec les tripes. D’ailleurs, la question ne se pose même pas ! Ce n’est là aussi possible que si je suis au clair avec mes besoins, avec mes désirs. Sinon, comment m’engager dans l’action à fond, « sans peur et sans reproche » ?
Je ne sais pas non plus ce que l’action va ouvrir comme possibilités (exemple : rencontre par échos). Autrement dit, l’absence d’emprise sur le résultat de l’action est progressivement intégrée. Ainsi, progressivement, la projection devient plus consciente, la proposition binaire « échec/succès » s’estompe, car elle correspond à une vision extrêmement restreinte du mental.
Et ce n’est pas tout : une fois l’action engagée, pour que l’effort puisse se maintenir, ces mêmes aptitudes de féminité profondes doivent être sollicitées. Sont aussi nécessaires, entre autres, la persévérance, l’adaptabilité, le « pas de la Lotta ».
Si je prends un autre domaine : celui des limites. Le Père entend ce qu’il a à faire ou pas, il ne va donc pas au-delà des limites de ses compréhensions, de ce qu’il a expérimenté. Il pose alors une limite aux désirs de mon surmoi. Quelques exemples de cadrage : freiner/stopper mon imaginaire négatif, ne pas aller au-delà de mes limites lorsque l’autre me demande un conseil, bousculer ma paresse, bousculer mes habitudes, etc. Il exerce sa capacité à se poser des limites en accord avec la Vie.
Et en même temps, si la notion de Père en l’être évoque l’idée de limites, on n’est pourtant pas dans la volonté de maîtrise. Pour entendre la différence, il me semble que la limite naturelle s’impose suite à la confrontation à l’absence d’emprise tandis que la volonté de maîtrise est justement le résultat d’une volonté d’emprise sur soi et sur le monde extérieur.
Ma responsabilisation dans ce que je vis avec moi-même et avec l’autre est aussi affaire de limites : vis-à-vis de moi-même, je constate et accepte que je sois totalement responsable de ce que je vis (je l’ai désiré, l’ai construit). Lorsque je parle de responsabilité, je l’entends dans le sens où que je sois conscient ou pas encore de ce qui m’anime, j’ai les outils pour l’entendre, j’ai la possibilité de le travailler pour me rééquilibrer (notion de libre arbitre). Je suis donc responsable du choix d’utiliser ou non mon libre arbitre. Autrement dit : au sens de la Vie, il n’y a pas de distinction entre le conscient et l’inconscient, c’est sous cet angle que la responsabilité est envisagée.
Pour assumer ma responsabilité d’être, il m’est nécessaire d’avoir entendu la complémentarité des scénarios et ses conséquences : l’absence d’emprise, l’altérité. Sans cela, le discernement n’est pas possible. Vis-à-vis de l’autre, j’entends alors la réalité de mon impuissance. Si ce n’est pas le cas, je travaille le matériau. Cela passera par exemple, par l’analyse de mes désirs conscients et surtout inconscients, des scénarios intérieurs qu’ils entraînent et leurs conséquences, leurs expressions dans la réalité concrète.
Une des conséquences est que le Père va dans l’action avec une certaine légèreté au cœur : il y a un calme, une force tranquille, souple qui se vit. Quelle que soit l’action (professionnelle, personnelle, amicale, etc.), elle se pose de moins en moins la proposition binaire : « faire pour l’autre » ou « faire contre l’autre ». Petit à petit, la motivation à l’action est moins subordonnée à la présence d’une autorité extérieure ou à des préceptes introjectés[3].
Cette proposition pathologique est issue des principes indifférenciés que j’ai introjectés. Ces vues de l’esprit, ces stéréotypes sont déconnectés de la réalité objective. Les dépendances extérieures (supposées telles au départ) sont progressivement identifiées (observations et compréhensions). Des actions de changement sont acceptées et mises en œuvre. Les résultats plus ou moins heureux[4] m’apportent des indications, des hypothèses sur moi-même. Elles me permettent de construire des références souples et temporaires.
Il n’est d’ailleurs pas préjugé du résultat de l’action : il est accepté qu’il y ait une myriade de paramètres qui m’échappent[5], qu’il y ait impossibilité d’appréhender globalement les conséquences de mon action[6]. La vie est perçue comme une œuvre de construction de soi-même : l’être se vit dans la CCCP (Critique Constructive Continue et Positive[7]).
Le résultat de mes actions peut se formuler en « expérience », en hypothèse de vie. C’est l’autorité intérieure qui est progressivement construite et utilisée dans la vie quotidienne. Elle est le fruit d’une expérience personnelle : ce n’est pas un copié/coller de principes généraux déconnectés du concret, du présent.
Peu à peu, je construis ma propre vision du monde[8] au travers de mes expérimentations personnelles, des résultats que j’observe. Le Père sait pour lui, dans la limite de ses expérimentations personnelles, concrètes et de ce qu’il en fait. L’être s’individue.
Cette réflexion personnelle repose de moins en moins sur des références extérieures. Il n’est plus question de « faire parler les morts ». Se conduire en fonction de ce qu’a écrit tel ou tel figure d’autorité[9]. Progressivement, les références que je croyais extérieures sont régulées au concret. Ce résultat propose un nouveau départ : j’observe, j’accueille au présent, j’écoute en conscience et j’agis en conséquence…le cycle recommence…la construction de la conscience est progressive.
Lorsque c’est intégré : ça « transpire » dans mes actions. Au concret, si j’ai un travail à faire, la motivation et le plaisir sont là. Et cela même lorsque je n’ai aucun compte à rendre à quelqu’un. Un bon exemple pour moi, c’est le travail analytique : personne n’est au-dessus de mon épaule pour vérifier que je travaille, la qualité de ce que je produis. Que je le fasse ou pas, l’autre n’en a cure. Autrement dit, je m’anime pour moi.
Progressivement, par petites touches, j’aperçois ce que je suis profondément, je me reconnais. Cette fois, c’est avec mes propres yeux (S barré vs. S2). Dans une modeste mesure, progressivement, je sais un peu de ce que je suis. Construire le Père en moi, c’est construire une capacité à me reconnaître moi-même. Le regard au travers duquel je me vivais[10] est peu à peu remplacé par « voir la vie au travers de mes propres yeux ». On peut parler de recouvrer la vue, d’accouchement de moi-même, entre autres.
Pour moi, construire le Père en moi est un synonyme de construire de la « conscience », de «l’être », du « sujet ». On est dans une notion de globalité, de boussole qui permet à l’être de s’orienter. L’observation, l’écoute, l’acception/l’action et son résultat m’enseignent progressivement ce que je suis. Non seulement dans leur utilisation entre elles, mais dans ma relation à chacune[11]. De plus en plus, féminité et masculinité en moi se mêlent intimement, harmonieusement dans un équilibre dynamique.
Une des conséquences et que lorsque le Père s’exprime en moi, ma conduite est caractérisée par une forme d’autonomie. Le mot qui me vient est le mot anglais « standalone ». Je le traduis par : « qui se tient seul ». Je prends en charge mes besoins, mes supposés manques, mes vécus sur les différents plans (somatisations physiques, émotions/motivations, sentiments, idéologies).
Cependant, même si j’ai commencé à construire le Père en moi, si je ne me pose pas dans mes ressentis, dans l’observation, dans l’accueil, cet outil ne me sera pas accessible. En effet, dans cette démarche de construction : il y a une autre tentation, c’est celle de se reposer sur ses lauriers. Cela pourrait se résumer par : « bon, j’ai fait un travail, c’est suffisant. Je suis arrivé. Maintenant, je n’ai plus à me soucier de cela : ça fonctionne en continu, je peux passer à autre chose ».
Personnellement, je me vois plutôt dans un processus continu de construction : comme certains organes croissent durant toute la vie. Une fois ce processus enclenché, plusieurs choses m’apparaissent: la première est que si je m’arrête, il y a fort à parier que je vais être tiré en arrière par la force des engrammes (les images pathologiques qui m’animent en tant que membre de l’espèce humaine).
La deuxième est que construire l’outil n’est pas tout : il s’agit de choisir de m’en servir ! En d’autres mots, il y a une possibilité d’utiliser mon « libre arbitre » plus en conscience. Et une fois qu’il a été entendu, le choix de le suivre…ou non. Autrement dit, la conscience que je construis ne va pas réguler ma vie inconsciemment (!). Ma présence à ce que je fais à ce qui m’anime est nécessaire.
Si j’ai entendu mes intérêts dans la relation et que je choisis de suivre ce qui est utile à la Vie, alors l’altérité propose une forme d’égoïsme basée sur les ressentis profonds. Ils me permettent d’entendre au présent et au concret l’action qu’il y a à mener, ni plus ni moins. C’est un grand service de vivre dans un égoïsme en conscience. Un service que je me rends et que je rends à l’autre.
Cette construction propose une forme de tempérance. En effet, un alignement intérieur, tout en souplesse et en bienveillance, se construit. La volonté de convaincre l’autre, de le contraindre, de le tordre s’apaise peu à peu[12].
Il me semble que l’on peut parler d’exploits, d’héroïsme de l’être pour lui-même dans cette aventure en soi-même. Cela interpelle les mythologies. Elles proposent des supports très riches si je choisis d’en écouter le reflet en moi, de les considérer pour des aventures intérieures. C’est un réservoir immense qui peut aussi être vu comme la mise à l’écrit des perceptions humaines. Elle peut être vue comme une synthèse très dense, en même temps limpide (mais en l’état) depuis des temps reculés (« les prédécesseurs ») [13].
L’accueil, le constat de ce que je me vois faire, penser, imaginer, etc. requièrent une absence de jugement de valeur. Et même si après de longues, très longues années, il peut y avoir l’illusion qu’on va être « plus blanc que blanc », cela me semble une erreur de perception. Par nature, je reste attaché au terreau humain.
Les mêmes sentiments, les mêmes désirs continuent de jaillir à travers soi. L’ensemble de la nature humaine avec tout son potentiel de pathologie et de construction continue à s’exprimer. Un peu plus souvent, il y a simplement quelqu’un au volant, plus d’aiguillages et…une marche arrière qui fonctionne aussi. Rien n’a été éliminé.
En fait, de cette promiscuité, de cette intrication des processus pathologiques et constructifs, on peut alors entendre comment les formes de pathologie représentent le matériau de base pour la construction de l’être. Les résistances au changement peuvent donc être vécues comme autant de signaux pour déclencher l’effort, le plaisir de me construire.
Des écueils qui peuvent se présenter :
Au cours du travail de synthèse, différents écueils me sont apparus. Afin de conserver un certain fil conducteur dans le texte, ils ont été regroupés dans cette partie.
Au niveau de l’observation, il peut y avoir des tentations surmoïques. Si des jugements de valeur montent, de plus en plus, je privilégie la neutralité et la bienveillance envers ce que je me vois faire, penser, imaginer, etc. L’imaginaire projeté sur la situation peut aussi polluer la perception des faits s’il n’est pas remis à sa juste place. Sans cela, il y a un risque de freiner ou de bloquer l’action.
Il en sera de même si je suis pris dans les émotions. Il s’agit ici des émotions dites « fortes », mais aussi, et surtout de leurs cousins symboliques : les désirs. Ceux-ci, comme l’aimant qui attire la limaille de fer, va attirer certaines perceptions, une certaine façon de percevoir la réalité. Cet angle particulier, sous le sens du désir, va exclure une grande partie du matériau qui se propose dans l’évènement.
Un autre obstacle pourrait être celui-ci : lorsque je suis pris dans le feu de l’action, le champ de perception est très concentré, le périmètre d’attention très étroit. Il va sans doute me manquer le minimum de recul pour percevoir ce que je vis. Il sera difficile d’entendre quoique ce soit dans cette agitation intérieure. Le calme intérieur m’est nécessaire. Il est à renforcer en continu.
Dans d’autres cas, j’ai compris ce que j’ai à faire, mais je ne le fais pas. Évidemment, je me pose la question : pourquoi ne pas bouger si j’ai compris ? Pourquoi cette forme d’inhibition d’action ? De castration ?
La décision implique de fait d’accepter la perte de bénéfices (secondaires). J’entends « bénéfice » le gain reçu (ou supposé tel) pour un investissement. Dans le fait de ne pas bouger, le prix à payer peut-être supposé minime. Du moins son importance est minimisée. Il est considéré comme sans importance.
Un exemple concret : mettons que je sois dissipé en classe. L’attention des professeurs, des parents est interpellée. Les autres élèves, les frères et sœurs, les parents focalisent alors leurs énergies sur l’enfant[14]. L’élève a donc fait un investissement supposé minime et il en espère un gain, un bénéfice secondaire : la préférence de ceux qui l’entourent, entre autres. L’enfant quand il ne perçoit pas la complémentarité des scénarios peut jouir de cette supposée emprise.
La compréhension de ce qui est en train de se jouer, l’appréhension du scénario ne peuvent donc se faire qu’avec une observation de mes vécus. Mais observation ne rime pas avec hypervigilance : on parle d’accueil, de relevé des faits, comme un chercheur dans son laboratoire intérieur. Il n’y a pas de volonté de tout saisir, de tout noter, de tout voir. La « fréquence radio » (l’état d’être) n’est pas celle de la volonté de maîtrise.
Ce relevé peut se heurter à une autre résistance : celle de rejeter la responsabilité de ce que je vis sur l’autre. Au-delà de ça, il m’est très facile de « voir ce qui anime l’autre ». C’est le refus de récupérer ce que je perçois chez l’autre[15]. Je m’explique : je me vois une tendance à rejeter le fait que je prête à l’autre des intentions. Ce mécanisme s’il n’est pas cadré m’empêche de récupérer bon nombre d’observations sur ce qui m’anime.
Par exemple, l’autre se conduit d’une certaine manière et cela me heurte. Ce n’est pas la réalité de la conduite de l’autre qui doit être le point de focalisation, mais ce que je vis face à cela. La mécanique interne est éclairée à chaque instant pour autant que je relève mes vécus (sentiments, émotions, souvenirs, principes touchés, etc.).
Au vu des nombreuses fois où j’ai cru que l’autre était dans le même rêve que moi alors que ce n’était pas le cas, mon surmoi accepte que la projection existe. Cependant, il est aussi proposé que la projection soit permanente et même qu’il ne peut y avoir que de la projection.
Autrement dit, je ne peux avoir accès à ce qui anime l’autre, je tourne en vase clôt. Cela s’exprimera par des formulations comme les interdits freudiens, l’altérité, la castration primaire, etc. Dès lors, je ne cherche plus à changer l’autre puisque c’est impossible (« il n’existe pas »). Le Père ne se préoccupe pas de l’autre[16].
Et là, j’y vois aussi un nouvel obstacle potentiel : celui de rester bloquer sur cette question : « tout n’est-il que projection » ? Pendant ce temps, le travail de construction ne se fait pas. Cette question n’a peut-être pas à être résolue dans la mesure où je m’intéresse à l’écho que l’évènement trouve en moi.
Il arrive souvent que des états d’âme soient présents, que je bafouille dans mes limites lorsqu’il s’agit de mener l’action. Le but est alors de me prendre en charge a posteriori : je travaille à faire la part des choses. Autrement dit : je m’entends et suis capable de poser des limites à mon surmoi, ou a le moins, de travailler le matériau a posteriori. Le but est de progressivement distinguer la réalité du vécu, l’imaginaire qui est en jeu, ainsi que les préjugés, les stéréotypes qui gouvernent ma perception de l’évènement.
Lorsque l’action est menée, un résultat se propose. Le résultat est peut-être perçu comme un échec. Sur cette perception, le surmoi pourrait proposer d’en rester là ! Autrement dit, la capacité à prendre du recul, à persévérer, à s’encourager (la féminité profonde) est requise pour continuer à avancer devant ce mirage surmoïque. Le mouvement naturel d’essais/erreurs n’a que faire des jugements de valeur, des vérités figées, des sentiments d’échec. C’est le mouvement qui compte !
Il m’est nécessaire d’entendre et reconnaître en moi que je me suis trompé. Autrement dit, que mes perceptions étaient faussées en totalité ou en partie !
Si je me vois dans l’erreur, cela n’implique pas que j’ai à le dire à l’autre. Si des jugements de valeur montent, je ne m’y soumets pas ou alors le minimum de temps. Autrement dit, si les processus intérieurs pathologiques prennent la main, je pratique au plus vite des exercices de recentrage pour sortir de cette hypnose.
Cette œuvre intérieure n’exclut pas l’autre ni le groupe. Quoiqu’il arrive, de par nature, je demeure au milieu de mes petits mois et vouloir évincer leurs reflets extérieurs est illusoire et hautement mortifère. Cela me prive du vis-à-vis indispensable à me construire[17].
On peut voir dans ces mécanismes une résistance au changement mise en place par les instances surmoïques. Les considérer sous cet angle me permet de progressivement prendre de la distance avec ceux-ci, de revenir à ce qui est important : me construire au travers de ce qui se propose au jour le jour. Il s’agit de « faire feu de tout bois ».
Rapport à l’autre
Dans le rapport à l’autre, il s’exprime avant tout le reflet de ce que j’ai construit ou non à l’intérieur. Ce que le Père reflète à l’extérieur est avant tout vécu, intégré en l’être. Il a une certaine habitude de la communication, du relationnel avec lui-même.
Si j’ai construit de la conscience et que je m’y positionne, je mets à disposition le résultat de mon expérimentation, ma « sagesse », si on entend celle-ci comme des hypothèses de vie temporaires et non des vérités absolues, des signifiants creux.
Sans mesure avec les paroles, l’état d’être s’exprime à travers moi. La rencontre de cet état d’être marqué par le travail peut susciter des interrogations en l’autre. Il peut, « s’il le désire », se donner une opportunité de « tirer le fil » en lui.
C’est cela qui est partagé, apporté dans la relation. D’ailleurs, il me semble que la rencontre de deux états d’être (et ce que je peux en faire pour moi) est la seule chose à considérer d’importance.
Sur le plan de l’échange, si et uniquement si l’autre le demande, je lui propose ce qui me paraît être des ouvertures dans son référentiel. Je ne prends pas celles-ci pour LA vérité[18]. De plus, le langage utilisé est adapté aux chemins privilégiés de communication de l’autre.
Cela n’est possible que dans un lâcher-prise avec la volonté d’emprise. Il n’y a donc aucune attente vis-à-vis d’éventuelles compréhensions ou progrès de l’autre. Si ce n’est pas le cas, la neutralité dans la relation n’est plus présente. Il est alors nécessaire de travailler la volonté d’emprise sur l’autre. Elle s’exprime entre autres par la recherche de complicité, le sentiment d’impuissance, les inhibitions d’actions qui m’animent, etc.
Ayant expérimenté la force et la puissance de l’inconscient profond, je vis une confiance dans les capacités de l’autre à s’en sortir. D’ailleurs, au-delà de la notion de confiance, il s’agit d’altérité : la réalité que je ne peux rien faire pour l’autre. Ainsi, le Père, le sujet lorsqu’il s’exprime dans l’être, a commencé à intégrer la notion d’altérité et il lui est naturel de respecter le chemin de vie de l’autre.
En d’autres mots, la notion d’emprise est déjà bien travaillée. Contrairement au « féminin perverti dans l’être », le Père se positionne dans une neutralité bienveillante vis-à-vis de l’autre. Le désir de l’ensemencer est hors sujet.
Conclusion :
La construction du père correspond à une intégration en conscience de la Mère et du Père en moi. Pour se faire, il me faut les récupérer tous les deux (féminité et masculinité profondes). À cela doit s’adjoindre leur utilisation harmonieuse où elles sont intimement liées.
Cette démarche en globalité propose une forme différenciée de percevoir la vie (une réflexion personnelle). L’autorité des processus inconscients (surtout pathologiques) est progressivement régulée au présent et au concret. Une autorité intérieure, basée sur la prise en charge des processus inconscients (pathologiques et naturels) se fait jour.
Loin de faire décoller l’être, ce travaille l’ancre de plus en plus au présent et au concret. Rien de sa psyché n’est éliminé, rejeté. Tout demeure, mais les choix se font plus en conscience : le mariage des opposés commence à s’opérer en lui.
Cet état intérieur (état d’être), c’est la seule chose qu’il met à disposition dans la relation. L’autre peut s’en servir pour lui-même (pour se construire), s’il le désire. C’est lui qui fait le boulot. Cet égoïsme en conscience : connaître ses intérêts, tous ses intérêts dans la relation, constitue sans doute la seule aide efficace mise à disposition de l’autre.
[1] Pour le surmoi.
[2] Quel que soit son plan d’expression : physique, psychique ou comportemental.
[3] Des règles de conduite intériorisées au contact de la famille…humaine (la Mère).
[4] CCCP
[5] Qui échappent à mes limites d’être humain.
[6] On est dans la notion de castration primaire.
[7] Copyright IESCA J
[8] De la conscience, de l’être
[9] De ce que j’en ai compris, de ce que j’y ai projeté perd de son sens
[10] Celui de la Grande Mère.
[11] 1- suis-je capable plus ou moins maladroitement de parcourir un cycle complet ? 2- comment est-ce que j’utilise ma capacité d’observation ? Mes compréhensions ? Etc.
[12] Cependant, elle ne disparaît jamais !
[13] La simplicité provient du fait que l’on est dans le domaine de la symbolique.
[14] Quel que soit son âge (enfant ou adulte supposé)
[15] Refus de la projection
[16] Cela interpelle la notion suivante : « la première chose : ne pas nuire à l’autre »
[17] Je parle de l’utilité de l’autre en tant que support de projection.
[18] Pas comme une vérité universelle qui serait applicable à l’autre et en dehors de laquelle il n’y aurait pas de salut